Patrick est venu nous parler du TAFTA (Transatlantic Free Trade Area)

Samedi 23 avril // 54 mars 13h.


Enregistrement audio :


C’est un vieux rêve des multinationales, qui l’ont notamment promu depuis plus de 10 ans à travers un de leurs lobbies, le Trans-Atlantic Business Council (TABC).

Accord Canada-EU (CETA)

•    Négociations entamées en juillet 2009, conduites dans le plus grand secret et conclues en septembre 2014
•    Le texte de l’accord est désormais public
•    La ratification par le Conseil européen et le Parlement européen est programmée au second semestre 2016

Accord UE-Etats-Unis (TAFTA ou TTIP ou PTCI)

•    Négociations entamées en juillet 2013
•    Sur base d’un mandat de négociation donné à la Commission européenne par les 28 gouvernements de l’UE, dont le gouvernement français
•    Le mandat de négociation a fuité avant d’être rendu public en octobre 2014
•    Le 13ème cycle de négociation s’est tenu à New York en avril 2016 toujours entouré d’un épais secret

Les trois chantiers de TAFTA-CETA

•    Suppression de tous les droits de douane sur tous les produits
•    Elimination des « barrières non-tarifaires »
•    Libéralisation des marchés de services

Suppression de tous les droits de douane sur tous les produits

•    Sans conséquence significative pour les produits industriels pour lesquels les droits de douane sont déjà très faibles
•    Potentiellement ravageur pour l’agriculture  paysanne européenne, qui reste protégée par des droits de douane élevés.

Élimination des « barrières non-tarifaires »

•    Sont considérées comme des « barrières non-tarifaires » aux échanges : les législations, réglementations et normes techniques, sanitaires, environnementales et sociales, dès lors qu’elles sont différentes des deux côtés de l’Atlantique
•    Pour les réduire, ou mieux, pour les éliminer, CETA et TAFTA proposent un dispositif à trois étages :
◦    Harmonisation (ce qui est pratiquement impossible) et à défaut reconnaissance mutuelle des normes existantes
◦    Possibilité donnée aux multinationales d’attaquer devant des instances d’arbitrage les nouvelles réglementations qu’elles jugent préjudiciables à leurs intérêts
◦    Mise sous tutelle du pouvoir réglementaire des collectivités publiques

Des approches radicalement différentes de la sécurité sanitaire :

•    Principe de précaution (UE) vs Équivalence substantielle des produits (États-Unis) : entre les deux côtés de l’Atlantique, la charge de la preuve d’innocuité d’un produit est inversée.
•    Traçabilité tout au long de la filière de production (UE) vs Décontamination du produit en bout de chaîne (États-Unis)
•    Applications : bœuf aux hormones, porc à la ractopamine, cultures OGM, poulets javélisés, produits chimiques, etc.

tafta-datagueuleAvant même leur adoption TAFTA et CETA contribuent à l’abaissement des normes sanitaires : le cas des perturbateurs endocriniens

•    Printemps 2012 : Publication par la DG Environnement du rapport de la commission Kortenkamp sur les perturbateurs endocriniens
•    Printemps 2013 : Projet de directive interdisant la commercialisation – jusqu’à preuve de son innocuité – de tout produit susceptible d’être un perturbateur endocrinien
•    Intense lobbying de l’industrie chimique européenne et états-unienne. Intervention du gouvernement des États-Unis qui attire l’attention de la Commission européenne sur les implications négatives de la directive proposée pour le projet TAFTA
•    Été 2013 : la Commission européenne décide d’engager une étude sur les incidences économiques de la directive et reporte en conséquence l’adoption éventuelle de la directive.

Les législations sociales

Les États-Unis n’ont ratifié qu’une seule des 4 Conventions Prioritaires de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) et que 2 des 8 Conventions Fondamentales de l’OIT

Ils n’ont notamment pas ratifié les conventions relatives à :
•    la liberté syndicale et la protection du droit syndical
•    les négociations collectives
•    l’inspection du travail
•    l’égalité de rémunération entre hommes et femmes
•    les  discriminations au travail

Les différends entre entreprises et États jugés par des tribunaux d’exception

Les entreprises étrangères qui estiment être pénalisées par une nouvelle réglementation
•    Peuvent déposer plainte contre les collectivités publiques (États ou collectivités locales) concernées
•    devant une instance arbitrale composée de trois arbitres (en général des avocats d’affaires)
•    pour demander le retrait de la mesure ou une compensation financière qui peut atteindre des centaines de millions de dollars
•    Les jugements prononcés par l’instance d’arbitrage sont sans appel.

Le mécanisme de règlement des différends Investisseurs-États est  présent dans l’ALENA (Accord Etats-Unis-Canada-Mexique) et dans de nombreux accords bilatéraux. 696 plaintes déposées à fin 2015, dont :

•    Veolia (France) contre l’augmentation du salaire minimum par le gouvernement égyptien
•    TransCanada (Canada) contre le refus du gouvernement des Etats-Unis d’autoriser qu’un oléoduc traverse son territoire
•    Vattenfalls (Suède) contre la décision du gouvernement allemand de sortir du nucléaire et contre la réglementation du Land de Hambourg sur les rejets dans l’Elbe
•    Lone Pine Resources (Canada-États-Unis) contre la décision du gouvernement du Québec d’imposer un moratoire sur l’extraction des gaz de schiste dans la vallée du Saint Laurent
•    Philip Morris (USA) contre les réglementations des gouvernements d’Australie et d’Uruguay sur l’étiquetage des paquets de cigarettes

Le pouvoir réglementaire des Etats et des autres collectivités publiques mis sous tutelle

Un « conseil ou forum de coopération réglementaire » composé de fonctionnaires des deux Parties à l’accord sera chargé
•    D’apprécier si les nouvelles réglementations envisagées par les États sont acceptables
•    De soumettre aux États des programmes de révision de leurs réglementations en vue de faciliter les échanges
•    Ceci, bien évidemment, après consultation des lobbies et entreprises concernés.

Le dépérissement programmé des services publics

•    Dans CETA et TAFTA tous les services sont ouverts à la concurrence internationale sauf exceptions listées dans une annexe aux accords ; c’est le système dit de la liste négative.
•    Par ailleurs, une clause de CETA, que l’on devrait retrouver dans TAFTA, prévoit que toute mesure de libéralisation d’un service initialement exclu de l’accord devient irréversible (clause cliquet)

Conséquences du principe de la liste négative et de la cause cliquet :
•    Un service public non explicitement mentionné dans l’annexe passe automatiquement sous le régime de la « concurrence libre et non faussée »
•    Toute création d’un nouveau service public est interdite
•    Tout retour en arrière sur des mesures de privatisation des services publics est impossible

Et tout ça pour quoi ?

L’étude des impacts de TAFTA commanditée par la Commission européenne prévoit :
•    Un PIB de l’UE augmenté de 0,5% en 2027 (moins de 0,05% par an !)
•    Une augmentation de revenu d’un foyer européen de quatre personnes de 345 Euros par an (0,23 Euros par tête et par jour !)
•    D’autres études (par exemple : Université Tufts, Massachusetts, États-Unis) prévoient au contraire un recul du PIB européen et des destructions d’emplois.
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On peut faire obstacle à ces projets

Il y a des précédents de projets d’accords internationaux morts-nés: Accord Multilatéral sur l’Investissement (AMI) en 1998 ; Accord sur la Contre-Façon (ACTA) en 2012

La résistance s’organise et se développe :

•    Création de collectifs Stop TAFTA (et autres accords de commerce et d’investissement) dans tous les pays de l’UE, aux États-Unis et au Canada
•    Démultiplication de ces collectifs au niveau local
•    Pression grandissante exercée sur la Commission européenne, les gouvernements et les parlementaires européens et nationaux pour qu’ils arrêtent ces négociations / refusent de ratifier ces accords

•    A ce jour 3.425.000 citoyens européens ont signé la pétition européenne demandant la non-ratification de CETA et l’arrêt de la négociation de TAFTA

•    En France 650 collectivités locales de toutes tailles représentant 5.683.000 habitants se sont déclarées hors TAFTA et CETA


Pour en savoir plus :

Le site du Collectif Stop Tafta : https://www.collectifstoptafta.org/

Le site d’Attac : https://france.attac.org/se-mobiliser/le-grand-marche-transatlantique/

Le site des Amis de la Terre : http://www.amisdelaterre.org/

Le site de bilaterals.org : http://bilaterals.org/spip.php?page=artbylang&lang=fr

Le site de Corporate Europe Observatory : http://corporateeurope.org/

mais aussi le site de la Commission européenne :
http://ec.europa.eu/trade/policy/in-focus/ttip/index_fr.htm

un livre : Les naufragés du Libre-Échange, Les Liens qui Libèrent, 2015


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